Le Président Macron et la « transition à la française » ont fait la « Une » cette semaine, avec la « Vision » développée dimanche et lundi dernier. En soi, faire la « Une » sur ce sujet est une bonne nouvelle, qui montre que les grands médias et, l’espère-t-on, leurs lecteurs et téléspectateurs, ont compris que le sujet est d’importance. L’exercice était difficile, le résultat est là : la France est l’un des rares pays à disposer désormais d’une « feuille de route », secteur par secteur, dotée d’objectifs chiffrés. La vision qui la sous-tend est celle d’une « écologie positive », « à la française » et « de souveraineté ».
Quelques scories ont rendu le message moins clair qu’il aurait pu être et fait couler beaucoup d’encre. Ainsi la saillie du Président sur « la bagnole », qu’il « adore » … On comprend bien l’intention – atténuer le sentiment d’une « écologie punitive »- mais peut-être Emmanuel Macron aurait-il pu aussi ajouter "j'adore la bicyclette en ville", nous dit Libération, qui enfonce le clou avec ce dessin d’humour :
Sur le net aussi, succès garanti, avec ces quizz qui ont fleuri sur les réseaux :
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Petit jeu : devinez, de la photo de droite ou de celle de gauche, laquelle illustre un départ en vacances après l’avènement de la « bagnole » électrique 😊
Plus sérieusement, le message présidentiel, tout en protection, peut apparaître, au choix, prudent (syndrome du gilet jaune) ou ambigu. Ainsi l’annonce sur l’abandon des centrales à charbon, qui réjouit bien sûr les promoteurs des énergies alternatives mais déçoit ceux qui soulignent que cet engagement portait initialement sur 2022 et qu’il est repoussée à 2027, ce qui fait titrer à La Tribune que Macron recycle une promesse non tenue. Même chose quant aux pompes à chaleur, qui sont « intelligentes » mais non, on ne va pas interdire, finalement, les chaudières à gaz pour autant. Certains observateurs regrettent donc que l’on continue de faire croire que la transition sera indolore, lors même que l’on sait qu’il n’en sera rien… Ce qu’on en pense chez (RE)SET, on le trouve dans une "tribune" publiée par La Croix. Quasi-parfaite dans l’esprit, la méthode -la planification- et le chiffrage global (40 milliards d’euros en 2024), la « transition à la française » invite à garder à l’esprit trois points de vigilance. D’abord, même s’il ne faut pas « désespérer Billancourt », on ne peut pas non plus laisser croire que la transition sera un chemin parsemé de pétales de roses, au risque de créer de fausses attentes. Ensuite, si l’on veut que cela fonctionne, il faut avant tout favoriser l’investissement, et pas seulement public : c’est majoritairement l’investissement privé qui permettra de réussir ou non la transition. Il faut aussi le flécher certes sur la décarbonation, mais pas seulement ! La ressource (l’eau, le sable, les minerais, …), la biodiversité, sont essentiels. Enfin, il faut rester vigilant car les résultats se devront d’être à la hauteur des projections, donc que les objectifs chiffrés énoncés ces derniers jours soient atteints. Or la transition est hélas un domaine où, d’expérience, il est rare que ce soit le cas, ce ne sont pas les experts du Giec qui nous contrediront…
Toujours plus en plastique
Pour autant, on ne peut que saluer l’excellent travail de fourmi du Secrétariat Général pour la Planification Ecologique (SGPE), dont les Echos reprennent la synthèse des travaux, avec ses 50 leviers dans tous les secteurs. L’ensemble reçoit les applaudissements nourris de Pascal Canfin, Président de la commission environnement du Parlement européen (et secrétaire général délégué de Renaissance) qui se réjouit de ce que pour la première fois, l'Etat est vraiment au rendez-vous du financement public de la transition écologique._
Parfaite illustration de ce que « la transition, c’est compliqué », la semaine aura également vu s'effondrer quelques mythes, ce que Novethic a bien noté : le lego en plastique recyclable, la consigne des bouteilles en plastique, l’avion vert de Lufthansa. Auquel on pourrait ajouter, en suivant Le Monde, la composition des smartphones qui s’avèrent, finalement, toujours plus en plastique. … Le point commun entre ces développements : de fausses bonnes idées pour une cause pourtant louable. Ainsi Lego a-t-il dû jeter l’éponge, ou la brique, après une phase d’expérimentation de deux ans. Le plus grand fabricant de jouet au monde renonce à fabriquer ses briques en plastique recyclé. Selon le directeur général du groupe, Niels Christiansen interrogé par le Financial Times, "l’utilisation du polytéréphtalate d’éthylène [PET] recyclé aurait entraîné des émissions de carbone plus importantes au cours de la durée de vie du produit". Le "niveau de perturbation de l’environnement de fabrication était tel que nous devions tout changer dans nos usines" pour accroître l’utilisation du PET recyclé, a ajouté Tim Brooks. "Après tout cela, l’empreinte carbone aurait été plus élevée. C'était décevant." On ne connaît ni les chiffres ni les références choisies, donc… no comment.